"Value in health care is measured in terms of the patient outcomes achieved per dollar expended. It is not the number of different services provided or the volume of services delivered that matters but the value. More care and more expensive care is not necessarily better care." The Big Idea (Kaplan, Porter)
« Pour chaque problème, il existe une solution simple, évidente, et fausse », Henry Louis Mencken.
1. L'article à lire absolument
Managing the myths of health care. Henry Mintzberg. World Hospitals and Health Services Vol. 48 No. 3 - Diaporama
2. Les mythes qu'il faut gérer d'urgence selon Mintzberg:
- Mythe n ° 1: Le système de soins de santé est en échec.
- Mythe n ° 2: Le système de soins de santé peut être organisé par une ingénierie sociale centrale.
- Mythe n ° 3: les établissements de soins de santé ainsi que l'ensemble du système peuvent être optimisés en les dotant d'un leader héroïque
- Mythe n ° 4: Le système de soins de santé peut être gouverné en le considérant comme une entreprise.
- Mythe n ° 5 et 6: les soins de santé sont à juste titre laissés au secteur privé par souci d'efficacité.
Une variante de ces mythes est exposée dans un court diaporama de Mintzberg
- Mythe n°1: Nous avons un système de soins. We have a system of health care.
- Mythe n°2: Ce système est terriblement compliqué. This system of health care is dreadfully complicated.
- Mythe n°3: Ce système est en échec This system is failing. (Perhaps it is succeeding, expensively.)
- Mythe n°4.a: L'ingénierie sociale centralisée. The health care system can be fixed by clever central social engineering.
- Mythe n°4.b: Le leader héroïque. Health care institutions can be fixed by bringing in the great leader.
- Mythe n°4.c: La compétition efficiente. The health care system can be fixed by more competition.
- Mythes n° 5 et 6:
- L'efficience du secteur privé. Health care is rightly left to the private sector, for the sake of efficiency.
- L'égalité du secteur public. Health care is rightly controlled by the public sector, for the sake of equality. - Mythe n°7: L'identité des valeurs entre public, privé non lucratif et privé. No matters which sector delivers the services, business provides the model for managing health care.
- Mythe n°8: La gestion axée sur la mesure des résultats. Measurement, “evidence-based”, must underlie all progress.
3. Le commentaire:
En situation de ressource rares et au nom d'expertises incertaines, force est de constater, à la lumière de l'article de Mintzberg consacré aux mythes du management de la santé, que les réformes des systèmes de santé mettent gravement en tension le financement des soins de santé avec celui de la promotion de la grande santé. Cette dernière relève de l'ensemble des politiques publiques et d'une certaine conception de la réingénierie sociale centralisée. Elle soumet les soins de santé à des arbitrages budgétaires en termes de calculs de coûts d’opportunité sans véritable consensus démocratique sur ce que sont les "résultats de santé", ni certitude scientifique sur les meilleures procédures à suivre pour y parvenir.
Dans ce contexte de négation idéologique des facteurs contingence dans l'organisation des soins de santé, on risque, au nom de la réduction d'inégalités de santé incontestables mais que les politiques publiques ne savent pas bien comment réduire, d'aggraver, et c'est déjà le cas, les inégalités d'accès à des soins de santé qui ont fait leurs preuves, inégalités que l'on savait jusqu'ici assez bien limiter, dans une contexte où les citoyens ne veulent pas voir s'évanouir la médecine de qualité qui va de pair avec le financement d'une assurance maladie solidaire. Cela suppose un juste équilibre démocratiquement défini entre healthcare (cure et care) et health (promotion de la santé comme bien-être économique et social).
Quelle est l'origine de ces mythes? Ont-ils une fonction politique?
Il y a une vision écosystémique de la santé, le saut paradigmatique dit "holistique" qui sous-tend toutes les réformes et qui légitime ce que Mintzberg appelle une ré-ingénierie sociale centrale. Face à l'absence de preuves et à l'échec de ces politiques de santé, il en appelle une évaluation du management en lieu et place du management par les résultats soi-disant fondé sur les preuves. La fusion des visions de la santé selon l'OMS et Alma-Ata converge vers une "grande santé" (health) où l'allocation des ressources vers les soins de santé (care) est soumise à des arbitrages de coûts d'opportunité au regard du "système de santé" (costs). Cette vision légitime un discours politique d'inversion du triangle d'allocation des ressources. (Figure sous ce lien)
Il y a une vision économique de ce qui peut être performant dans la production des biens et service de santé et qui repose sur les théories psycho-économiques relatives aux motivations, à la décision et aux incitations que la régulation du système doit déployer. Cette vision économique appliquée à la santé est supportée par les modèles de la Harvard Business School notamment par Porter et Teisberg (value based competition) et Clayton Christensen (will disruptive innovation cure healthcare). (Figure sous ce lien)
Il y a enfin une arène politique internationale complexe qui met en tension les programmes d'ajustement structurels (SAP) portée par des organisation internationales. Au nom de la performance publique, la tendance générale est de réduire les dépenses non seulement de santé - en particulier celles de l'assurance maladie et de la part de la médecine qu'elle supporte - mais aussi d'éducation et des services sociaux. Dans le contexte du Nouveau Management Public ces politiques top down conduisent à des méthodes de contrôle de gestion qui ne peuvent aboutir qu'à des soins low cost et à la perte de sens pour les porteurs d'activités. Les résultats poursuivis, tels que définis pour les besoins du modèle, n'ont plus de sens pour les soignants mais font l'objet de persécutions bureaucratiques toujours plus pressantes, les activités sont reconstruites selon des notions comptables comme productrices "d'objet de coûts" assimilés aux "objets de prix" des financements officiels, et enfin les compétences clés sont menacées dès lors que les contours des professions sont ré-adaptées sans garde-fous à cette ubuesque comptabilité de gestion.
Rien n'est sûr, en dehors de la contingence qui règne sur le prétendu système de santé (dont l'existence est un mythe selon Mintzberg) à la fois en terme d'absence de consensus sur les modèles de résultats et d'incertitude radicale sur la conduite optimale des procédures.
La matrice consensus- certitude de Stacey et Zimmerman s'oppose ainsi parfaitement à la grande idée de Kaplan et Porter qu'on peut résumer ainsi:
"The remedy to the cost crisis does not require medical science breakthroughs or new governmental regulation. It simply requires a new way to accurately measure costs and compare them with outcomes."
Sources:
The Triple Aim: Care, Health, And Cost- Donald M. Berwick, Thomas W. Nolan and John WhittingtonThe Healthcare Ecosystem
La contingence dans les organisations et systèmes complexes explique l'échec du Nouveau Management Public.
Sources: matrice de Stacey et Zimmerman
- http://moodle.unitec.ac.nz/pluginfile.php/163808/mod_resource/content/0/Agreement_Certainty_Matrix_1_.pdf
- http://www.gp-training.net/training/communication_skills/consultation/equipoise/complexity/stacey.htm
- http://mandenews.blogspot.fr/2010/08/test3.html
Typologies d'Ouchi, modèle de Jarillo
Esculape vous tienne en joie