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dimanche 27 juillet 2014

Public versus privé selon l'ATIH - Machine de guerre idéologique et appareils idéologiques de santé


Salut, heureux imputables!

« Les hommes qui habitent les pays démocratiques, ont donc souvent des pensées vacillantes ; il leur faut des expressions très larges pour les renfermer. Comme ils ne savent jamais si l'idée qu'ils expriment aujourd'hui conviendra à la situation nouvelle qu'ils auront demain, ils conçoivent naturellement le goût des termes abstraits. Un mot abstrait est comme une boîte à double fond ; on y met les idées que l'on désire, et on les en retire sans que personne le voie.» Tocqueville

Thinks tanks de santé et politique du salami

Il convient de situer ce rapport dans une campagne de propagande bien orchestrée par des appareils idéologiques de santé bien huilés.

La prise en charge, deux fois plus chère à l’hôpital qu’à la clinique, selon l’ATIH (Quotidien du médecin)

Selon Bernard Granger, "L'analyse du Quotidien du médecin ne précise pas qu'il s'agit du coût moyen de la prise en charge des pathologies (GHM) médicales et chirurgicales, mais qui ne sont pas les mêmes pathologies ! Les comparaisons GHM par GHM fournies dans ce rapport montrent des écarts beaucoup plus faibles. La page 93 (annexe 5) montre que le privé est concerné par 697 GHM et le public par 2072 GHM . Il faut également préciser que les missions de l'hôpital public et celles des établissements privés ne sont pas les mêmes."
C'est le modèle de la comptabilité hospitalière, et le management qui en découle qui sont vicieux, mais il faut prendre le temps de le démontrer. 
Ainsi mal pensée, mal organisée et mal financée, notre très bureaucratique "machine à guérir" et à se foutre de l'assistance publique ne peut que s'autodétruire.
Le nouvel enjeu en santé est cure et care à la fois et non pas cure contre care, soins contre social, différenciation technique contre intégration des soins en prétendant faire le contraire!
N'oublions pas Tocqueville: en période de disette, l'art de l'ajustement consiste à séparer les "malheurs immérités" à "assurer" des "infortunes que le vice a produit", à "assister".

L'ATIH est-elle indépendante ? (FHF)

Question faussement naïve de la FHF qui s'applique à toutes les agences pseudo-indépendantes derrière lesquelles les politiques publiques dissimulent les choix tragiques de l'ajustement structurel. Les politiques y imposent des modèles économiques, les experts les habillent de mathématiques pour en faire des modèles médico-économiques et l'ATIH enveloppe le tout de statistiques, à la recherche du "business model unique".

3 doses de contrepoison intellectuel





Les faux amis de l'hôpital français


Le déclin hospitalier français Frédéric Bizard. Economiste - Enseignant à Sciences Po Paris

Beaucoup de bonnes choses dans ce texte, qui commence bien mais qui finit mal, parce que les économistes et politiques  de régulation "macro" ignorent avec la superbe arrogance propre aux experts français que le modèle de comptabilité et de performance hospitalière: 
  • 1. est intrinsèquement et opérationnellement faux parce fondé sur une vision managérialiste, l'imposture de l'organisation scientifique par le "couple infernal intégration-processus" selon François Dupuy. Il ne capte pas les véritables processus clés de l'hôpital  ("the core competence of the corporation"). Les modèles de coûts construisent des modèles d'activités ubuesques, guidés par les business models artificiels qu'ils ont engendré (Activity Based Costing), bien différents entre public et privé.
  • 2. est structurellement incapable de capter le coût des déterminants "médico-sociaux" de l'hospitalisation par construction des GHM sur une fonction de production purement curative. La neutralité tarifaire est en France une baliverne inacceptable au regard des missions de l'hôpital et de la réalité des motifs d'admissions des malades à l'hôpital.
  • 3. ne peut supporter le paiement à la performance dès lors que les indicateurs myopes, d'output à courte vue n'ont aucun sens pour les opérationnels au regard de leurs motivations intrinsèques. Ils ne peuvent les conduire qu'au désespoir et/ou à l'exit.
  • 4. que tous ces remèdes à la mode, fondés sur des concepts filandreux et répétés jusqu'à la nausée après des diagnostics justes voire même brillants par les chiens de garde ne reposent sur aucune evidence based policy! "Entre autres, rendre autonome la gestion des hôpitaux publics, repenser nos modèles hospitaliers, extraire l'Etat du pilotage opérationnel du secteur hospitalier et installer une démocratie sociale moderne, respecter la neutralité tarifaire dans le financement, utiliser le mode de rémunération à la performance..." Assez!!

21 milliards d'économies à trouver sur la Sécurité sociale : quelles pistes pour maîtriser les dépenses sans trahir l'esprit de l'Etat-providence

Attention, cet article soutient le managed care à la sauce hollandaise. L'Institut Montaigne et Bébéar ne sont pas loin. (Plus sur l'Institut Montaigne)

En finir avec la corporate governance et l'infantilisation managériale qu'elle induit
Médecine privatisée vs. "Obamacare"

« La responsabilité sociétale de l’entreprise est d’accroître ses profits » Milton Friedman

Ce qui est intéressant ici, c'est que les docteurs refusent, à juste titre, de dissocier exécution et conception. De fait il faut savoir articuler marché des besoins, des talents et des payeurs. Mais une telle autonomie ne peut-elle se concevoir dans le cadre d'un service "not for profit"?
Citer cet article après avoir mis en avant Jean-Pierre Escaffre et sa critique de la marchandisation assurantielle, que nous partageons d'ailleurs pour beaucoup d'entre nous, peut paraître provocateur ou inconséquent. Néanmoins, il est incontestable que notre modèle de technocratie pseudo-marchande est incapable de faire se rencontrer les besoins, les compétences clés, l'organisation et les financements; là dessus la critique des libéraux contre les défaillances de la bureaucratie sanitaire restent fondamentalement justes.

D'un autre coté, critiquer la T2A et ses GHM par "cas" à court terme pour proposer d'enfermer les malades dans des "groupes homogènes de parcours", nouveau rêve des actuaires des assurances cachées derrière les think tanks qui les portent aux nues, c'est tomber de Charybde en Scylla. Dans tous les cas on individualise le risque, au profit des assureurs qui veulent prendre de le contrôle de l'organisation et des compétences, inévitablement au nom de process de production qui dissocient conception et exécution.

Le parcours est la nouvelle arme idéologique des assureurs! Le parcours est le nouveau concept attrape-tout de l'action publique, nul n'étant défenseur de parcours chaotiques.

Ce qu'il faut c'est restaurer confiance, responsabilité et liberté au niveau des micro-systèmes cliniques, au contact du public. Cela n'exclue pas, au niveau "méso" des départements à taille humaine, à délégation réelle et dont la conception serait enfin cohérente avec ses micro-systèmes. L'ennemi n'est pas la T2A qui n'est qu'une très mauvaise clé de répartition, mais beaucoup plus fondamentalement la direction par objectifs top down (macro), les gestion par les résultats (méso) qui a justifié l'organisation divisionnelle en pôles et la comptabilité basée sur l'activité qui reconfigure les processus sur des modèles de coûts séparant par construction ce qui relève de l'assurantiel et de l'assistantiel (micro) engendrant ainsi cynisme et désarroi pour les acteurs du soin.

Si nous sortons à la fois du culte de l'Etat scientiste jacobin et de la divinisation du marché efficient, il vient qu'il faut guérir notre système de la maladie managériale décrite par François Dupuy dans "Lost in management". Elle touche tout autant institutions publiques et entreprises privées: le reporting contre-performant par ses coûts et sa chronophagie et les redoutables effets de la loi de Goodhart, l'obsession du risque comptable, le couple infernal intégration-processus, la médecine actuarielle dénoncée par Skrabanek ("la fin de la médecine à visage humain").

Il faut peut-être avant tout comprendre que vouloir en même temps fixer arbitrairement des enveloppes globales de protection sociale et mesurer les coûts de prestations définies comme "pertinentes" selon les payeurs, ne peut fonctionner que sur des modèles de production et de "résultats" construits non en fonction des besoins (ou de la "demande" perçue par les professionnels si on préfère ce terme) mais en fonction des contraintes imposées à l'action publique par l'ajustement en contexte de rationnement. C'est pourquoi définir la santé de façon holistique et new age comme bien-être économique et social permet de passer la main des professionnels opérationnels aux experts des politiques publiques.

Changer de logiciel


Dans sa dernière édition, The Economist commente les effets de la crise financière de 2008 sur les dépenses de santé des pays de l'OCDE : ralentissement de la croissance des dépenses de santé, qui repartent à la hausse depuis 2010, les dépenses privées plus que les dépenses publiques, mais sans atteindre (encore) le taux de croissance d'avant la crise (voir diagramme ci-dessous). Ce ralentissement des dépenses a eu des conséquences variables mais souvent négatives sur l'état de santé des populations.


Esculape vous tienne en joie

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