dimanche 24 mars 2013

Brève histoire du pacte de défiance

Comment cela a-t-il été possible? Quel aveuglement général peut masquer une telle destruction de la qualité des soins sous l'effet de l'action publique en France?
C'est pourtant simple, mais il faut la décrire comme le résultat de l'affrontement de deux principes radicalement inconciliables.

« On dit qu’une action est conforme au principe d’utilité, quand la tendance qu’elle a d’augmenter le bonheur de la communauté l’emporte sur celle qu’elle a de le diminuer » Jeremy Bentham

« Agis de telle sorte que tu traites l’humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre, toujours comme une fin, et jamais simplement comme un moyen » Kant




1. La Pression macro économique majeure sur les lits d'hôpital est aujourd'hui légitimée par une fausse qualité et une fausse "santé publique". Cette qualité définie d'en haut par des "agences" faussement indépendantes de l'Etat et cette santé publique assimilée au bonheur qui est, rappelons-le, le but de la politique selon Aristote mais non celui de la Médecine, ont érigé le veau d'or de la "santé numérique" par le reporting. L'enfumage sur la destruction des soins de santé solidaires est bien organisé par la clique des intellectuels organiques, leurs "chiens de garde" médiatiques et par la promotion des modèles de performance publique de l'OCDE.
Je ne nie pas qu'une véritable performance soit possible, mais elle ne peut être fondée que sur une vision décloisonnée de la pertinence des soins, qui commencerait par analyser les déterminants réels de l’hospitalisation, en lien avec l'affaiblissement des réseaux familiaux et socio-sanitaires de soins et de soutien! L'hôpital "machine à guérir" et contraint malgré lui à produire des Groupes Homogènes de Malades (GHM), une réalité toute virtuelle mais étroitement normée, conditionnant sa survie financière, au mépris le plus complet de la réalité de la transition socio-sanitaire, va à rebours de la place qu'il doit avoir dans la nouvelle territorialité.
Nous ne pouvons rester dupes de programmes d'ajustement structurels (SAP) dignes de ce qui est imposé aux pays du tiers-monde dans leur stupéfiante injonction à sacrifier à une gestion financière court-termiste les soins de santé, l'éducation, la recherche et les service sociaux pour les populations servies. César et Mammon, ces nouvelles idoles de la santé publique,  celle du "divin marché" avec les mythes du marché efficient et celle la Déesse Raison d'où émane le mythe de la rationalisation managériale, ne sont là que pour masquer la destruction systématique des hôpitaux publics. La main invisible du marché et la main visible des managers y sont devenu à dessin des tueur redoutables, par l'effroyable jeu de leur dyssynergie quotidienne. Jeux de mains jeux de vilains.

2. La Technocratie intermédiaire déploie les injonctions paradoxales venues "d'en haut" avec tous les effets pervers connus, mais d'autant plus mutuellement paralysants qu'ils sont sans garde-fous, de la rationalisation managériale et de la managed competition. La rationalisation néo-managériale est le produit appliqué à la santé de la corporate governance dont l'objectif premier est de protéger les ayants-droit (Etat ou actionnaires; pour Milton Friedman et l'Ecole de Chicago, l'intérêt de l'actionnaire passe avant toutes les parties prenante et nous sommes bien au coeur de "l'Etat prédateur" néo-libéral chargé de généraliser la forme entrepreneuriale).
Tous les garde-fous indispensables à un minimum d'efficacité espérée sont pourtant largement décrits dans la littérature managériale et dans celle qui porte sur les conditions du déploiement de la yardstick competition importée des USA*. De plus en France nous avons abandonné l'organisation médicale des soins et créé une couche managériale hospitalière qui ne connaît rien au méthodes de travail réelles. Elle ne sait que fermer maladroitement les robinets financiers, face aux arguments médicaux qui oscillent aujourd'hui entre "management by decibels" et "management by lobbying". De raison médicale, il n'y en a plus guère quand il s'agit simplement de stratégies de survie pour nos activités cliniques. C'est la guerre hobbesienne de tous contre tous et le Léviathan-providence est bien fatigué.

3. Le grand désenchantement des rameurs, au premier niveau de gouvernance, est toujours superbement ignoré par le "pacte de défiance". C'est celui de l'équipe ou structure interne, unité clinique, ou de soins comme vous voulez la nommer, ou encore le service au sens premier de service organisé rendu au patients. C'est celui où s’effectue la prise en charge opérationnelle au contact du public qu'il faut vaporiser, puisque la doxa managérialiste vise avant tout à laisser un ensemble de "techniciens supérieurs" de santé face au directeurs, impuissants vers le haut mais tout-puissants vers le bas depuis la loi HPST. C'est le niveau que les ingénieurs de santé veulent réduire à néant , celui ou se conjugue le leadership médical tant honni et le lien intangible entre le médecin, l'équipe et le patient. Ce niveau est essentiel pour la qualité et la sécurité des soins puisqu'il conditionne l'a possibilité d'équipes stables, formées et motivées. Il est donc impératif qu'il émerge dans la représentativité des médecins hospitaliers, à l'échelon local des établissements, territorial de santé et régional au niveau des ARS. Ni la Commission médicale d'Etablissement (CME), ni des pôles qu'on pourrait imaginer comme n'étant pas "PIM PAM POUM", c'est à dire construits autoritairement et sans cohérence en termes d'élaboration de leur politique médicale, n'auront de légitimité réelle de gouvernance sans cet étage là qui n'est autre que celui de la clinique.

*dont la lutte contre les grands trusts hospitaliers et leurs accord collusifs, qui peuvent tout à la fois mieux sélectionner les patients, mieux réduire la qualité des soins non évaluée et sans risques juridiques faute de pouvoir augmenter les prix, mieux segmenter les séjours à leur guise, mieux organiser les "restrictions verticales" de leurs nouvelles filières internes, mieux pomper sans vergogne certains secteurs hospitaliers encore sous Dotation Globale pour en faire des variables d'ajustement (Soins de Suite et de Réadaptation et psychiatrie). L'AP-HP n'a rien de spécifique. Comme toutes les grosses machines trop gigantesques pour être efficientes elle accélère seulement la gidouille par l'opacité de sa pyramide hiérarchique et une CME hélas captive du système. La CME est tristement réduite au rôle de "mutin de Panurge" d'un cost-killing conduit de façon ubuesque dans le sillage des gestionnaires de risques financiers.

Ami patient, malade, simple usager, membre ou non d'une association de malades, de personnes handicapées ou d'une autre nature, sache que s'il n'est qu'un simple être humain, le médecin n'est pas l'ennemi que tu crois et que désignent à ta vindicte tous les ajusteurs de dépenses publiques. Médite ces deux pensées de Kant et de Bentham citées au début de ce message. Dis-toi bien que le médecin est fondamentalement du coté de l'humaniste qui vise avant tout l'intérêt de son patient et non de l'utilitariste qui ne sait que calculer l'intérêt général. Du moins prétend-il savoir le faire.

«Le médecin n'est pas au service de la science, de la race ou de la vie. C'est un individu au service d'un autre individu, le patient. Ses décisions se fondent toujours sur l'intérêt individuel.»  Théodore Fox, ancien rédacteur en chef du Lancet

«L'homme purement économique est à vrai dire un vrai demeuré social. La théorie économique s'est beaucoup occupée de cet idiot rationnel, drapé dans la gloire de son classement unique et multifonctionnel de préférences. » Amartya Sen


Webographie

Le premier schéma en haut du message est adapté de:
A rapprocher de Redefining Healcare (MIchael Porter, de la Harvard Businesse School, critique les formes actuelles de la managed competition, mais il propose hélas d'en sortir par la value-based competition)



vendredi 15 mars 2013

Voyage au centre de la dysorganisation: la boite noire, l'ingénieur et le processus



Ubu gestionnaire de risques?

"Entre la paranoïa, la rationalisation et la rationalité, il n'y a pas de frontière nette." Edgar Morin

Je le répète: le mythe du marché efficient sert un ajustement politique plus rapide des dépenses, par l'asphyxie financière, par les restructurations induites par les pseudo-marchés, voire par la vente par appartements de l'offre de soins publique et de l'assurance maladie au secteur marchand. Toutefois, il faut se rendre à l'évidence, le processus de management descendant du "macro" vers le "micro-économique" est essentiellement de type "soviétique". Il est d'une part empêtré dans le vérificationnisme d'un modèle "expert" de contre-performance absolue, le "management public", qui a engendré une spirale de la défiance politique et sociale en pensant en finir un peu vite avec les bureaucraties légales-rationnelles de Max Weber, et il est d'autre part noyé par une incontinence réglementaire à nulle autre pareille, que déplore à juste titre Jean de Kervasdoué.

Un cercle vicieux? Les pompiers pyromanes et les "transgresseurs contrôlés" comme Jean de Kervasdoué, qui ont beau jeu de dénoncer un hôpital soviétique, continuent à reprocher aux professionnels et /ou aux directeurs qu'ils ont faits tout-puissants une incoordination des parcours dont ils sont bien les premiers responsables! On crée de nouveaux "machins" gestionnaires de coopération et de nouveaux métiers dont les "sortologues" pour lutter contre une fragmentation qu'on a cessé d'aggraver entre soins et social. Incontinence gestionnaire, incurie organisationnelle et iatrogenèse managériale vont de pair!

Nous n'étions pas nés marchand, hélas nous le sommes devenus (Batifoulier) dans un mécanisme de prophétie auto-réalisatrice que les Cassandre avaient prévu. La greffe néo-libérale n'a fait qu'accélérer les effets désastreux du Nouveau Management Public.

Les critiques récurrentes du reporting exponentiel, si coûteux et si contre-productif qui accable les cadres médicaux mais surtout paramédicaux ainsi détournés de la clinique, les protestation argumentées à propos de mesures toujours plus absurdes tirées d'heuristiques de disponibilité de données qui masquent le "travail réel", deviennent quasiment impossibles à énoncer, sauf à risquer un suicide professionnel y compris aujourd'hui pour les médecins. Si la concurrence régulée (managed competition) reste un pilier de la doxa néo-managérialiste, l'analyse des processus par les technostructures moins que semi-habiles n'en continue pas moins son travail synergique de destruction massive de la qualité des soins. Les "boites noires" ne sont pas si aisées à ouvrir que le prétend la religion officielle de rationalisation à outrance. L'effet conjoint de ces croyances, nous le constatons au quotidien, dans les pertes de chances, des défauts de soins d'orientations et d'accompagnement, les gaps, et surtout la confusion de concepts dans une novlangue gestionnaire qui ne sait produire que de la perte de sens, de la démotivation au travail, du désenchantement voire du burn out des soignants.

Il faut lire ces extraits édifiants et , pardonnez moi, ô combien ubuesques de projets d'instructions de la CNAMTS.
Qui ne voit que la Gestion Des Risques se confond ici avec le modèle de performance publique de l'OCDE et avec la "gestion axée sur les résultats" de la LOLF?

Les syndicats de médecins peuvent à juste titre s'émouvoir s'émouvoir de l'absence de volonté politique de réformer la loi HPST au delà d'un léger habillage cosmétique, mais l'observation des enceintes mentales et des souricières cognitives dont témoignent les textes ci-dessous démontre bien qu'on n'est pas prêt de voir émerger le leadership médical à sa juste place dans la gouvernance qui s'annonce. Si le problème est international il s'inscrit chez nous dans des équations régionales et nationales toutes particulières.


Eléments de contexte
L’analyse transversale de cinq processus de soins réalisée par l’assurance maladie et 
publiée dans le rapport sur les « charges et produits pour l’année 2013 » a permis de mettre 
en lumière l’importance d’exploiter des marges de manœuvre nouvelles afin d’améliorer la 
qualité et l’accessibilité aux soins tout en optimisant les ressources disponibles. 
Les actions identifiées par l’assurance maladie dans le cadre de ces « processus de soins » 
relèvent dans leur grande majorité de trois catégories de leviers :
• les actions liées au levier « prix » (des médicaments, des actes, etc.) qui dépendent 
en grande partie du niveau national ;
• les actions relatives à l’offre de soins, dont certaines dépendent également du niveau 
national : textes réglementaires sur les conditions techniques de fonctionnement et 
conditions d’autorisation des établissements, plans de santé publique qui créent des 
filières et parcours de soins, conventions avec les professionnels libéraux, réformes 
de financement et campagnes financières qui impactent directement les évolutions 
etc. D’autres actions relatives à l’« offre de soins » dépendent du niveau régional. Il 
s’agit souvent d’actions en lien direct avec des actions de GDR (développement de la 
chirurgie ambulatoire, par exemple) ;
• les actions liées à la production ou à l’actualisation de référentiels et de 
recommandations de bonnes pratiques, qui s’inscrivent dans une perspective de 
moyen terme et qui relèvent en particulier de la HAS. 
Les “processus de soins” concernés par cette démarche sont relatifs aux pathologies ou 
interventions suivantes:
  • cancer colorectal ;
  • arthroplastie du genou ;
  • chirurgie des hernies et traitement des varices ;
  • insuffisance cardiaque ;
  • diabète.
Cette démarche « processus de soins » est complémentaire des programmes de gestion du 
risque initiés en 2010 et aux actions mises en place par les ARS pour améliorer les parcours 
de soins. Les actions développées relèvent d’une mise en œuvre régionale ou nationale. La 
démarche est co-pilotée au niveau national par la CNAMTS, la DSS, la DGOS, la DGS et le 
SG. Elle fera l’objet d’un suivi dans le cadre du COPIL GDR et du CNP.
A horizon 2017, la CNAMTS estime que la mise en œuvre de toutes les mesures associées 
aux cinq processus de soins pourrait générer une économie de 1,6Mds€.


L’analyse transversale de plusieurs processus de soins, réalisée par l’Assurance Maladie et 
publiée dans le rapport sur les « charges et produits pour l’année 2013 », a mis en lumière 
l’importance d’exploiter des marges de manœuvre nouvelles afin d’améliorer la qualité des
soins et leur accessibilité tout en optimisant les ressources disponibles.
Ainsi – dans le cadre de la démarche GDR conduite par les ARS – sera développée une 
approche « par processus de soins, en analysant, pour un ensemble de problèmes de santé, 
différentes étapes dans ce processus […] et en recherchant systématiquement les 
améliorations possibles en termes de qualité, de résultats de santé et de coût »
.
Conclusion: Pour ceux qui n'ont pas encore bien assimilé le nouveau paradigme de l'action publique, je vous rappelle l'excellent modèle de double fonction de production de Patrick Gibert


Ils peuvent aussi relire Chandler: "la main visible des managers" qui décrit bien l'émergence des entreprises multidivisionnelles (fondées sur la standardisation et les centres de résultats) que nous avons hélas pris en modèle, en l’appauvrissant bien sûr risque nos "pôles" (divisions)  ne sont ni autonomes, ni constitués pour pouvoir l'être. Histoire de changer de Mintzberg et de Galbraith père et fils (-:

Chandler avait insuffisamment perçu le poids croissant des NTIC: lisez d'urgence "la pensée powerpoint" qui complète merveilleusement cette histoire du lien entre néo-management,  NTIC et... dé-professionnalisation.

 Webographie (nouveautés sur le site d'ubulogie clinique)

Désenchantement des soins et iatrogenèse managériale

2. Ubu ingénieur de filière: un modèle de cercle vicieux

Voici un modèle anglais de cercle vicieux adapté en français et qu'on peut appliquer à toutes les maladies et états chroniques handicapants quelle que soit l'étiologie et à n'importe quel âge. Il faudra le traduire en français en l’adaptant à notre système de soins. Ce cercle vicieux s'oppose au modèle linéaire français des "filières", qu'elles soient centrées sur des catégories causales (AVC, traumatisés crâniens, cancer, addictions...) ou centrées sur les hospitalisations non programmées (filières SAU centrées articulées aux fusions d'hôpitaux). Ce schéma anglais, à partir des points saillants difficilement contestables mis en exergue à chaque étape, peut recevoir des explications causales complémentaires relatives à l'organisation et au financement des soins (enveloppes, planification, gouvernance, tarification et modèles d'incitations sous-jacents).
A rapprocher de Redefining Healcare (MIchael Porter critique les formes actuelles de la managed competition, mais propose hélas d'en sortir par la value-based competition)


mercredi 23 janvier 2013

FINANCEMENT DES HOPITAUX PUBLICS : CHANGER DE LOGICIEL



Communiqué de presse du Mouvement de défense de l’hôpital public

Message du Pr Bernard Granger:
Rédigé à la suite de l’annonce d’un nouveau plan d’économie de 150 millions d’euros pour l’Assistance publique – hôpitaux de Paris (APHP), le texte ci-joint appelle à une profonde réforme du financement des hôpitaux publics afin que soit abandonnée l’approche tarifaire à l’activité (T2A) retenue ces dernières années. Cette modalité de financement n’est adaptée qu’aux activités techniques programmées pour des pathologies de gravité moyenne. Elle est inadaptée à la prévention, aux pathologies rares, complexes ou chroniques. Elle est inflationniste et ne prend en compte ni la pertinence ni la qualité des soins. Elle ne favorise pas la coopération mais pousse au contraire à la concurrence entre les établissements et les professionnels de santé. Le financement des hôpitaux à la T2A étant borné par une enveloppe budgétaire fixe, l’ONDAM, voté chaque année par l’Assemblée nationale, le développement de l’activité entraîne une baisse annuelle automatique des tarifs. Enfin, cette pratique tarifaire oblitère l’avenir en ne permettant pas les investissements nécessaires pour garantir à nos concitoyens des conditions d’hospitalisation adaptées et le bénéfice du progrès médical.

Ce texte demande aussi que soit menée une mission de réflexion sur l’APHP et son avenir, comme l’a suggéré Edouard Couty dans les pré-conclusions de son rapport sur l’hôpital. Le fonctionnement actuel de l’APHP, caractérisé par un millefeuille bureaucratique multipliant les niveaux de décisions, est source de désorganisations auxquelles il faut mettre un terme.

La communauté médicale de l’AP-HP soutient fortement ces propositions. Elles ont déjà été signées par plus de 175 praticiens hospitaliers, dont le professeur Loïc Capron, président de la commission médicale d’établissement (CME) de l’APHP, les deux représentants du corps médical au conseil de surveillance de l’APHP, de nombreux autres membres de la CME, de multiples chefs de pôles et responsables de services.

Le MDHP a demandé à être reçu au cabinet de la ministre des Affaires sociales et de la Santé pour l’alerter sur cette situation et l’inciter à mettre en œuvre les évolutions qu’il préconise.
Note: le Pr Bernard Granger précise qu'un rendez-vous été obtenu pour le 6 février d'après un article du "Quotidien du médecin".
                                                

FINANCEMENT DES HOPITAUX PUBLICS : CHANGER DE LOGICIEL


Le plan d’efficience de l’APHP prévoit de restituer en 2013 une somme de 150 millions d’euros, saignée annuelle devenue désormais rituelle et prévue pour durer. L’APHP a déjà  réalisé 310 millions d’euros «d’efficience» en 3 ans. Le nouvel objectif annoncé est irréalisable dans des groupes hospitaliers déjà soumis à une pression financière intenable. Les inaugurations de bâtiments flambants neufs parfois d'ailleurs inadaptés ou surdimensionnés ne sauraient masquer la réalité quotidienne: les équipes à bout, les locaux vétustes, insalubres, hors normes, les équipements non entretenus ou non renouvelés, les investissements gelés. Les 3 seuls moyens mis à notre disposition à ce jour pour «  faire  de l’efficience » sont  devenus inefficients :
1-Poursuivre l’augmentation de l’activité. La population n’étant pas plus malade qu’avant, il s’agit de « gagner des parts de marché ». Cette concurrence entrave les bonnes coopérations que l'APHP devrait avoir les autres établissements de service public. Une activité supérieure n'est qu'une course à l'échalote sans bénéfice pour les patients et encore moins pour l'assurance maladie. Elle est en partie illusoire compte tenu de la baisse des tarifs programmés pour respecter l'ONDAM.  Elle n'est de toute façon plus possible à l'APHP qui peine à assurer le maintien de l'activité actuelle.
2-Diminuer les coûts en  faisant  des « économies de personnels ».  Ce n'est plus tenable au niveau des personnels assurant  les  soins et les activités supports  sauf à dégrader  la qualité.  Entre 2009 et 2011 les personnels non médicaux de l’APHP sont passés de 51 239 soignants à 48 600. Il n’est pas possible de poursuivre dans cette voie, sauf à refuser d’assumer l’offre de soins actuelle.
3-Poursuivre des restructurations de grande ampleur. Celles réalisées précédemment nécessitent des temps d’adaptation qui n’ont pas encore permis de retrouver le niveau d’activité antérieur pour certains des sites affectés. Il ne semble donc pas y avoir des ressources à trouver par cette voie. 
On peut sûrement réduire encore le nombre de personnel du siège ne serait-ce qu'en appliquant réellement le principe de subsidiarité  entre le siège et les hôpitaux et en supprimant les très nombreux doublons de procédures administratives. On peut encore gratter quelques millions en poursuivant la vente des "bijoux de famille" et il faut certainement  réaliser quelques micro-restructurations utiles. Mais le compte n'y sera pas ni pour 2013 ni pour après.
Il faut donc changer le logiciel au niveau de l'APHP comme à l'échelle nationale. Il faut en finir avec l'alternative: ou défendre son hôpital au détriment de la Sécurité sociale ou défendre la Sécu au détriment de son hôpital. C'est à dire qu'il faut que les  acteurs et les institutions aient une incitation financière à appliquer le juste soin au juste coût c'est à dire au moindre coût, ou du moins qu'ils ne soient pas pénalisés par leurs efforts, comme c'est le cas actuellement.
Il faut mettre en place un  système de financement permettant  de défendre son hôpital tout en défendant la Sécurité sociale, en assurant la qualité des soins et en  maintenant l'activité globale en terme de soins et non de séjours (indépendamment des modalités de prises en charge ambulatoires ou en hospitalisations).Le principe doit être le suivant : une part significative des économies réalisées  au bénéfice de la collectivité (et non des bénéfices de l’hôpital engrangés en multipliant abusivement les activités « rentables »)  doivent revenir collectivement à ceux qui les réalisent. Ce juste retour  doit se traduire en moyens humains et techniques supplémentaires et/ou en amélioration des conditions de travail (il n’est pas contradictoire avec une participation à la solidarité institutionnelle si celle-ci se fait dans la transparence).
 Les gisements d'économies pour les cliniciens sont essentiellement de deux ordres :
- d'une part supprimer des gaspillages par la juste prescription (des médicaments, des dispositifs, des examens complémentaires, des transports...) ; i faut donc en faire une politique de rationalisation des soins fondées sur la pertinence des actes ;
- d'autre part développer des  pratiques innovantes et moins coûteuses permettant notamment le remplacement d'une partie des hospitalisations  par des soins ambulatoires correctement financés et la réduction des hospitalisations  inutiles ou inutilement prolongées grâce à l'amélioration de la coordination des soins avec l'aval et l'amont de l'hospitalisation mais aussi à l'intérieur même de l'hôpital.
Cela suppose :
1°) d’assurer parallèlement le financement de la recherche et du progrès médical « authentique » ;
2°)  de sortir du tout T2A et de la convergence tarifaire intra sectorielle. Il faut créer des financements nouveaux pour des activités nouvelles (remplacement de certaines hospitalisations de jour par des hospitalisations de demi-journée ou des consultations pluriprofessionnelles médicales et paramédicales, forfaits de prise en charge ambulatoire spécifique portant sur une durée  limitée, remplacement d'unités d'hospitalisation par des équipes mobiles comportant médecin senior et paramédicaux, création de structures intrahospitalières de soins de suite spécialisées...).
 Seuls les professionnels sont à même  au niveau de chaque spécialité et de chaque service de faire des propositions pour travailler autrement. Nous appelons  à une refonte de la stratégie managériale de l’APHP où il faut revenir à une gestion médicalisée partant des équipes de soins dans les services et organisant des évaluations comparatives interservices et interhôpital. Les collégiales qui le souhaitent pourraient être force de propositions au lieu d’être cantonnées à des stratégies défensives
Parallèlement, nous demandons au ministère :
1) une  révision de la répartition de l'ONDAM avec une réduction de la part croissante accordée aux industriels  et aux prestataires de la Santé sans rapport avec l'amélioration du service médical réellement rendu ;
2) une limitation du champ d’application de la T2A ;
3) une régulation des tarifs au niveau de chaque établissement ;
4) la mise en place de dotations négociées au niveau des ARS sur la base de contrats d'objectifs et de moyens ;
5) la définition d’une politique de financement des investissements lourds hors T2A et l’autorisation pour les hôpitaux d’accéder à des prêts à taux zéro  auprès de la nouvelle  banque publique d’investissement ;
6) la mise en place d’une « mission APHP » dans le but de définir un plan à 10 ans resituant la place des différents hôpitaux de l’APHP dans les territoires de santé de l’IdF (sur les 150 millions d’économie demandée pour 2013, la moitié concerne les groupes hospitaliers du Nord et de l’Est de Paris et de Seine Saint Denis).La  gouvernance et les modalités de fonctionnement de l’institution doivent être redéfinies (quelle décentralisation ? quelle intégration avec l’université ?).
Nous réclamons la mise en place d'une concertation nationale avec les soignants, les représentants de la Sécurité sociale  et du ministère pour repenser le mode de financement des hôpitaux et sa régulation allant au-delà d’une simple mission de toilettage de la T2A. Nous n’accepterons pas une politique se limitant à de simples aménagements de la  logique productiviste dans un budget restreint,  conduisant au « toujours plus avec  toujours moins » dans un plan de retour à l’équilibre sans fin.

René Adam  Paul Brousse
Catherine Adamsbaum Bicêtre
Henri Agut Pitié Salpêtrière
 Daniel Annequin  Trousseau
Elisabeth Aslangul  Hôtel Dieu
Jean Azerad Pitié Salpêtrière
Emmanuel Barranger Lariboisière
Zina Barrou  Pitié Salpêtrière
Béatrix Barry Bichat
André Baruchel  Robert Debré
Jacques Bataille Raymond Poincaré
Franck Baylé Sainte-Anne
Hakim Bécheur  Bichat
Jean-Pierre Becquemin Mondor
Jacques Belghiti  Beaujon
Albert Bensman Paris
Francis Berenbaum St-Antoine
Jean François Bergman  Lariboisière
Jacques Blacher Hôtel Dieu
Laurent Boccon Gibod Paris
Liliane Boccon Gibod Paris
Jacques Bodaert Pitié Salpêtrière
Jean-Jacques Boffa Tenon
Catherine Boileau Ambroise Paré
Marie-Christophe Boissier  Avicenne
François Boué Antoine Béclère
Pierre Bourgeois Pitié Salpêtrière
Daniel Brasnu  Pompidou
Gille Bruckert Kremlin Bicêtre
Christian Brun-Buisson Mondor
Françoise Brun-Vézinet Bichat
Catherine Buffet Bicêtre
Jean Cabane St-Antoine
Loïc Capron président de la CME de l’APHP
Alain Cariou Cochin
Yves Castier Bichat
Yves Catonné Pitié Salpêtrière
Marina Cavazzana-Calvo Necker
Gilles Chaine Avicenne
Philippe Chanson Bicêtre
Julien Charpentier Cochin
Gérard Chéron  Necker
Xavier Chevalier Mondor
Jean-Paul Chigot Pitié Salpêtrière
Olivier Chosidow  Henri Mondor
Annick Clément Trousseau
Benoit Coffin Louis Mourier
Elvira Conti Trousseau
Jean-Michel Correas Necker
Jacques Cosnes St-Antoine
Joël Coste Hôtel-Dieu
François Costi Corentin Celton
Rémy Couderc Trousseau
Sophie Crozier  Pitié Salpêtrière
Nicolas Dantchev Hôtel-Dieu
Nathalie De Castro  Saint Louis
André Denjean Robert Debré
Georges Deschênes Robert-Debré
Jean Pascal Devailly  Bichat
Denis Devictor Bicêtre
Hervé Dombret Saint-Louis
Gilles Dhonneur Mondor
Didier Dreyfuss  Louis Mourier
Jean Charles Deybach Louis Mourier
Danièle Dubois Hôtel Dieu
Christophe Dupont Necker
Jean-Michel Dupont Cochin
David Elkharrat Ambroise Paré
Marc Espié Saint Louis
Brigitte Fauroux Trousseau
Alain Faye  Pompidou
Alain Fischer  Necker
Anne-Marie Fischer Pompidou
Bruno Frachet Rothschild
Camille Francès Tenon
Gérard Friedlander Pompidou
Olivier Gagey Bicêtre
Frédéric Galactéros Mondor
Noël Garabedian  Necker
Antoine Garbarg-Chenon Trousseau
Joël Gaudelus Jean Verdier
Alain Gaudric Lariboisière
Anne Gervais  Bichat
Pierre Marie Girard   Saint Antoine
Anne Gompel Cochin
Michel Goossens Mondor
Cécile Goujard Bicêtre
Olivier Goulet Necker
Bernard Granger  Cochin
Gilles Grateau Tenon
André Grimaldi  Pitié Salpêtrière
Antoine Guedeney Bichat
Corinne Guérin Cochin
Pierre-Jean Guillausseau Lariboisière
Christian Guy Coichard  Saint Antoine
François Haab Tenon
Laurent Hannoun Pitié Salpêtrière
Agnès Hartemann  Pitié Salpêtrière
Pierre Hausfater Pitié Salpêtrière
Bénédicte Héron Trousseau
Gérard Huchon Hôtel-Dieu
Christian Jacquot Pompidou
Roland  Jouvent  Pitié Salpêtrière
Bertrand Knebelmann Necker
Alain Krivitzky Avicenne
Matthieu Lafaurie Saint Louis
Béatrice Laffy-Beaufils Corentin Celton
Etienne Larger  Hôtel Dieu
Véronique Leblond  Pitié Salpêtrière
Marion Leboyer Mondor
Antoine Leenhardt Bichat
Véronique Lefebvre des Noettes Emile Roux
Jean-Pierre Lefranc Pitié Salpêtrière
Claire Le Jeunne Hôtel-Dieu
Jean-Pierre Lépine  Lariboisière
Olivier Lortholary Necker
Francis Louarn Albert Chenevier
Bertrand Lukacs Tenon
Elizabeth Macintyre-Davi Necker
Isabelle Macquin-Mavier Mondor
Jacqueline Mandelbaum Tenon
Xavier Mariette Bicêtre
Emmanuel Masmejean   Pompidou
Philippe Massin Bichat
Dominique Mazier Pitié Salpêtrière
Michel Meignan Mondor
Jean-Louis Misset Saint-Louis
Mostafa Mokhtari Bicêtre
Jean-François Moreau Paris
Dominique Musset Béclère
Isabelle Nègre Bicêtre
Marie Hélène Nicolas-Chanoine Beaujon
Jean-François Oury Robert-Debré
Yves Panis Beaujon
Thomas Papo Bichat
Antoine Pelissolo  Pitié Salpêtrière
Julie Peltier  Tenon
Christian Perronne Raymond Poincaré
Gilles Pialoux Tenon
José Polo Devoto Béclère
Pierre François Pradat  Pitié  Salpêtrière
Frédéric Prat Cochin
Alain Prigent Bicêtre
Catherine Renaud  Pitié Salpêtrière
Sylvain Renolleau Trousseau
Michel Reynaud Paul Brousse
Christian Richard  Bicêtre
Christian Sainte-Rose Necker
Dominique Salmon Cochin
Rémi  Salomon  Necker
Marc Samama Hôtel-Dieu
Nicolas Sellier Jean Verdier
Jean Pierre Siffroi Trousseau
Thomas Similowski Pitié Salpêtrière
Gérald Simonneau Bicêtre
Alain Sobel Henri Mondor
Hervé Sors Pompidou
Brigitte Soudrie Hendaye
Jean-Claude Soufir Cochin
Marc Tardieu Bicêtre
Michel Teboul Cochin
Emmanuel Teiger Mondor
Eric Thervet  Pompidou
Nicolas Thiounn Pompidou
José Timsit Hôtel Dieu
Christophe Trivalle Paul Brousse
Jean-Christophe Vaillant Pitié Salpêtrière
Paul Valensi Jean Verdier
Dominique Valla  Beaujon
Bruno Varet Necker
Jean-Paul Viard Hôtel-Dieu
Stéphane Vignot  Pitié Salpêtrière
Daniel Vittecoq Bicêtre
Pierre Wolkenstein Mondor
Patrick Yeni Bichat
Elie Serge Zafrani  Mondor
---------------------------------------
Irène Frachon Brest
Joelle Janse Marec  Levallois Peret
Patrick Jourdain   Pontoise
Michel Leporrier Caen
Bertrand Mas    Marseille
Frédéric Pain  Deux Sèvres
Georges Picherot Nantes
Jean François Pinel  Rennes
Nicole Smolski Lyon